Un point dans l'esprit permet, en dehors de tout brouillage, au poète, mais aussi à chacun, une position privilégiée face aux questions qui se posent aujourd'hui. Cette vision s'oppose à l'état de cécité dans lequel chacun peut se trouver à un moment de la vie, de l'Histoire ou de la civilisation. L'actualité nous donne autant d'exemples tragiques où les points de vue s'opposent, où les individus s'affrontent de façon verbale ou violente. Or, ce point permet au poète notamment d'acquérir une distance face aux événements en lui permettant de pouvoir saisir plus ou moins distinctement les données d'un problème. Tant que l'on puisse comprendre des phénomènes qui se passent dans divers états de conscience de la part de tous les protagonistes. Car, dans la vie réelle, les choses sont souvent bien plus complexes et enchevêtrées. Pourtant, certaines choses sont évidentes. Ces discours racistes de personnalités qui stigmatisent des populations entières me font vomir. Et plus l'actualité est tragique et plus le discours est radical. Parce que d'un côté une population jeune semble trouver dans la confrontation un juste prolongement de son malaise et de son sentiment d'être rejetée et que de l'autre rien n'ai fait pour atténuer cette inquiétude et cette rage ; parce qu'une population a le sentiment tout simplement de ne pas exister et de ne pas compter et que de l'autre côté les discours xénophobes appellent à toujours plus de rejet, l'homme juste a pour fonction d'éclairer la scène chancelante là où la haine et l'incompréhension sont totales. La banlieue est potentiellement un espace de richesses économiques et culturelles. Pour peu que la haine cesse. Toujours cette opposition entre l'image et ce qu'elle représente. Toujours cette question du sens qui se pose. Derrière la haine, il conviendrait de mettre des idées et de l'action. Les banlieues peuvent se développer si tout est mis en place pour accompagner ce mouvement. Encore faut-il autoriser la réflexion et la distance. Encore faut-il que les réflexes primaires et les discours de rejet cessent. C'est pourquoi le poète et chacun doivent-ils appeler à l'expression inconditionnelle des idées. La banlieue peut sortir du gouffre et les discours extrémistes seront battus. Les idées peuvent vaincre le racisme et la xénophobie. Le poète et chacun peuvent participer à cette construction.
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Face aux murs
Ce graphisme n'est pas un vulgaire graffiti tracé à la hâte par des mains anonymes, il s'agit du « Mur de la lune », un assemblage de plaques de céramiques fait par Joan Miró en 1958 sur un mur d'un bâtiment de l'UNESCO à Paris. A l'heure où les bus flambent à nouveau, il faut se demander si les murs ne sont pas aussi et surtout dans nos têtes. Trop de choses s'accumulent dans les médias qui ne mettent l'accent que sur les faits divers alors que la richesse est partout, enfouie, assourdie, dissimulée dans les esprits de chacun. Certains gestes démontrent une opposition radicale face à un ordre établi, engagé contre des individus dont il chercherait à nous convaincre de l'impardonnable nocivité. Or, et quelques soient les noms que l'on donne pour faire vite et marquer les esprits, ces adolescents, ces jeunes, sont surtout désorientés et livrés à eux-mêmes. Peut-être, beaucoup n'ont-ils plus de repères, préfèrent-ils utiliser la violence pour marquer inconsciemment un déficit d'attention, d'éducation et d'écoute ; certes des comportements extrémistes existent, oui la violence engendre un chaos et une peur qui font oublier les véritables carences, mais je ne peux m'empêcher de penser à l'extrême richesse potentielle qui attend dans les quartiers pour peu que l'on veuille un jour lui prêter attention. Les murs dans nos têtes sont engendrés par un quotidien qui ne parvient pas à mûrir et à sortir des ornières et du train-train, or tout prouve qu'un sursaut véritable ne peux venir que de la confrontation des idées, et celles-ci ne peuvent être exposées que par une autre attitude face à tous les problèmes. Mais les médias ne nous facilitent pas la tâche en occultant de façon obscène les données de la banlieue. La misère, la violence, le racisme grandissent et un ministre met de l'huile sur le feu en espérant que la flamme elle-même sera un contre-feu. La télévision que l'on regarde trois heures par jour, nous donne à voir un monde édulcoré où l'utopie de la publicité rythme la marche des cerveaux, rien ne filtre, pas de débats, pas d'idées, pas de coups de gueule, sauf quand ça crame, sauf quand un adolescent désorienté pense trouver dans la radicalisation un nouveau moyen d'être, tout pourrit en silence, en sous-sol, dans la rue. L'UNESCO aurait beaucoup de travail à faire ici, je crois. Et Miró pourrait venir barbouiller un autre mur. Il n'y aura jamais assez d'énergie véritable pour combler le déficit d'écoute et d'attention face aux problèmes qui sévissent dans les banlieues.
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Come as you are
Mot à Maux est, dans les prochains mois, appelé à disparaître. Ne prenez pas votre mouchoir, comme dit la chanson : ce ne sera qu'un au revoir. Un suicide ? Pas vraiment. Ce sera plutôt l'acceptation d'une inévitable fin. Tout comme l'insecte à la fin de la métamorphose, prêt à accueillir une seconde mort, tout comme le soleil qui s'éteint dans la mer, il faut accepter un autre voyage. Toutes ces notes ne furent pas forcément pénibles à écrire, mais j'attends ma retraite comme le voyageur sait qu'il va bientôt monter dans un train, sans forcément connaître sa destination. Moi, je sais bien ce que je vais faire de mes derniers jours, je n'ai pas encore arpenté toutes les routes, j'ai encore des ballades à faire et je prendrai mon sac avec un même plaisir, celui de savoir les merveilles à découvrir sans pour autant savoir quand finira le chemin. Ça doit finir là-bas, au bout de la dune, il suffira de lancer sa ligne, d'attendre un peu, pas très longtemps, et de remonter le poisson. Et puis, c'est poser sa toile sur un paysage, respirer lentement les embruns. C'est être calme et en paix, au moment où le désespoir se tait un peu, où les horreurs se calment. Il n'y a pas à être pressé de partir, tant que les vagues s'enroulent un peu, tant que la lune est toujours là. Alors, quelques notes bien placées, quelques coups de gueule, deux, trois pensées dérobées à la nuit, et puis je prendrai mon sac. Ce blog ne fut pas exhaustif, mais on ne va pas refaire l'histoire, il fut, je crois, assez proche des préoccupations de chacun. Quant à la revue, après le sixième et dernier numéro à paraître en décembre, le rideau tombera aussi. Cette aventure qui m'a beaucoup apporté fut l'occasion de beaucoup de rencontres entre amis. Si une revue parle en poésie, la poésie elle-même est, je crois, une attention particulière à ce qui nous entoure, à ce qui vit en soi. Son message est, je crois, singulier, certaines choses ne peuvent être dites qu'en poèmes. Voilà, en ce qui concerne ce blog et la revue. Tant que la vie est possible, il faut l'honorer. Tant qu'une lueur luit encore, il faut la regarder. Le temps d'une chanson, peut-être, ou d'un souvenir qui s'efface.
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