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  • Traction-Brabant 7

    « La poésie n'est pas chose marrante » nous dit Patrice Maltaverne, rédacteur en chef de la très désorganisée revue Traction-Brabant. Magnifiquement protégée par un papier calque qui lui donne un aspect particulier et précieux, la revue ornera impeccablement votre bibliothèque. Si la pagination a volé dans tous les sens, les "pohèmes" (sic) eux sont bien présents pour nous dire qu'il convient de se méfier des produits trop bien manufacturés, des vérités polies et de l'ordre établi. Un acte politique donc, qui explore les vérités et les insuffisances du langage. Si les illustrations sont laides, c'est parce que « La réalité n'étant pas toujours bien belle » montrer parfois les choses permet de s'en extirper. Un regard donc, comme un cri, un défit qu'avec un minimum de moyens et un peu de témérité on puisse rivaliser de conviction avec les plus prestigieuses publications. Parce que certains discours se perdent en sens, que d'autres sont édulcorés, Traction-Brabant revient à une vérité simple, dépouillée. Comme le dit Régis Belloeil : « L'expansion se fait dans le chaos. Aussi difficile d'oublier que de faire semblant d'exister. Le bonheur est enterré trop profond mais. Un ray de lumière noire me guide follement vers l'origine du sens . » et plus loin : « Fuyons les prophètes du bonheur marchand, fossoyeurs d'une pureté sans laquelle la traversée de l'existence s'apparente à. (...) A quel ministère adresser ma demande en trois exemplaires. / D'un semblant de vie meilleure ? » Exorcisme donc. Volonté de détruire mais de construire aussi. « En cas de danger / tirer la poignée », c'est bien cela que nous propose Traction-Brabant d'un ton volontairement accrocheur afin de mieux nous alarmer des perversions d'une certaine société. Et comme conclue Didier Trumeau : « Plus c'est plein moins c'est vide alors ils n'ont plus de place pour mettre le plein et c'est bien triste car le plein cela fait moins vide ». Une histoire de fous pas si folle que ça si l'on se penche avec attention sur les pages de Traction-Brabant.

  • "Corpus", Jean Gédéon

    En ces temps d'examens du baccalauréat, Mot à Maux inaugure sa rubrique consacrée au comptes-rendus de lectures. Emmanuel Berland me propose avec amitié le dernier Hélices, « Corpus » de Jean Gédéon. Ainsi le mot est-il défini dans le Larousse : « corpus : Ensemble de documents servant de base à la description ou à l'étude d'un phénomène. » Il est aussi un « Recueil concernant une même matière. » Il va sans dire que toute lecture est une interprétation. L'éclairage suivant m'est tout à fait personnel. Si le poème fait appel à la sensibilité de chacun il en exprime quand même une vérité commune. C'est avec cette conviction que j'ai lu ce recueil. Ici le poète rêve plus qu'il n'est « Dans les lueurs intermittentes / de la folie ordinaire. » Il inspecte son âme... Si l'homme est hanté par les monstres il est aussi un ange dont l'élévation est sans cesse menacée par la chute. L'être assiste à son propre sommeil, s'il rêve « de calme et de sérénité », il est aussi celui où se noient « dans l'antichambre les rêves du passeur. » Face à la mort et à ses mystères l'écriture poétique est la seule capable de maintenir l'élévation. A travers l'utilisation des symboles, Jean Gédéon redéfinit l'espace de la vie quotidienne, redessine les cartes de l'imaginaire et permet l'expression d'images étonnantes : « L'air agité de branches frissonne en toi / comme une fièvre. » ; « Avant d'un dernier souffle éteindre la bougie » ; « Et tu envies les morts à l'ombre des platanes. » Etre enfin lui-même est le rêve du poète, est-ce un rêve impossible ? Face aux explosions du soleil, aux coups de foudres, à l' « Oublieuse mémoire » le poète est celui dont les mots permettent de marcher vers la lumière. Dès lors, il est celui qui « Cherchant ce talisman qui ouvre la porte de l'invisible » est capable de parvenir à « l'ultime diérèse », à la réalisation du Corpus.

  • Ca CASSE...

     

    CASSE la revue de Jean-Jacques Nuel a disparu en décembre 1996 après 21 numéros. Mot à Maux en a récupéré 3 exemplaires. Vous ne la connaissiez pas, moi non plus ! Et pourtant il est toujours plein d'enseignements de reconnaître qu'une revue vit et meurt. Savoir ce qui a fonctionné et ce qui est à regretter peut éviter de commettre les mêmes erreurs. Nous ne sommes là que pour un temps, celui qui ne sait pas qu'il va mourir très bientôt ne rate-t-il pas les priorités ? Faisons-nous les mêmes choses à partir du moment où nous nous savons mortels ? Tous un jour... Et il convient de savoir quelques choses essentielles. Les revues sont l'outil idéal pour la promotion de la culture et de la littérature. Ce lieu d'échanges et de découvertes est celui qui éduque, renseigne, suscite. Transmettre un savoir est en quelque sorte un des buts de la revue. Outre présenter de très bons textes en s'adressant à un public déterminé, la revue ouvre les yeux sur ce qui se passe autour d'elle, d'essentiel, de formidable, de révolutionnaire. La revue CASSE a disparu à la "fin de la grande époque de la revue papier" (JJ Nuel), mais d'autres continuent. Je ne sais pas, je n'ai pas vécu cette époque. J'ai commencé à ouvrir les yeux à partir du moment où je me suis rendu compte que la revue était ce qui pouvait le mieux rendre compte de l'écriture, de la réalité et ce qui pouvait le mieux exprimer des valeurs. La revue c'est avant tout le lecteur. C'est la capacité à s'extirper de soi-même, à se consacrer aux autres, à réalisé que nous sommes faits de toutes les richesses qui sont autant d'individus. La capacité à porter un regard. Aujourd'hui Internet change la donne. Nous ne sommes plus soumis à une vérité unique, à des mensonges organisés, nous tenons en main un morceau de notre destinée. Libre à chacun de s'exprimer, de rencontrer ailleurs et sur un même espace de nombreuses autres singularités. Nous formons la toile, nous sommes une pensée en mouvement. Dans l'uniformisation, la morosité et l'indifférence, chaque voix est essentielle. Mot à Maux ne serait pas là sans l'espoir de rencontrer ces autres individus, sans la conviction que les atomes sont faits pour graviter autour d'un même point central, le noyau. Aujourd'hui le noyau est composé de notre expérience, de nos convictions et de notre désespoir. Le noyau est une vie, qui cessera, qui sera remplacée par une autre vie, et ceci indéfiniment. Casse a disparu en 1996, combien de temps vivra Mot à Maux ?