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Mot à Maux - Page 22

  • "Peur", poème de Victor Malzac

    Peur

     

    Ma tête FRACASSÉE

    Percute les pavés de sa ville —

     

    Sa pierre

    Avalait mon manteau

    Tombe –

     

    Partout percute

    Et coque

    Ma tête en fer poli

    La mare froide mon manteau – sur les pavés s’assèche

     

    Et mon manteau n’est pas autre chose qu’un lac de cuir un lac de pierre un sac à main pour étouffer ma peau ses pores je transpire et m’étouffe je transpire en marchant je marche et le soleil et le soleil anxiété

    – dans les anciens récits des épopées périmées.

     

    Percute mon passé

    Dans les pavés des villes –

    Ma tête s’y réverbère. –

     

    (poème inédit)

     

    Victor Malzac se présente à nous :

     

    J’ai 21 ans. Je suis élève de l’Ecole Normale Supérieure et je fais tout pour rendre ma poésie vivante – la poésie ne périclite pas, ce n’est pas vrai – j’adore le tiret long. Depuis peu j’envoie mes textes à quelques revues qui les apprécient, notamment Souffles et Arpa. J’ai été finaliste du Grand prix de Poésie Joseph Delteil en 2018, et mention spéciale université du Prix Matiah Eckhard 2018. Aujourd’hui j’attends que le temps passe et je souris.

    Je viens de Méditerranée.

    J’aime vivre. Je crois en la force des formes canoniques qu’il faudra revitaliser, auxquelles il faut offrir de nouvelles perspectives – je connais mon latin.

     

  • "Incipit", poème de Majead At’Mahel

    Incipit 

     

    Soldat de l’ombre

    Le monde est pavé de tristes mines

    J’irai te rejoindre sur ton front suant

    D'angoisse et de solitude

    Je creuserai dans ton cœur

    Une tranchée patriote

    Nous serons deux à combattre nos vieux démons

    A coups de pioches et d’introspections

    D’éclats de rires et de silences de luxe

    Jusqu’à ce que lumière s’en suive

    14-18

    39-45

    Il n’y a pas d’âge pour renaître de son obscurité…

     

     

    Alors que nous célébrons l’armistice de la Grande Guerre, voici un poème digne d’Apollinaire, que nous offre Majead At’Mahel. Issu d’un ensemble «  EN TOUTE L'ÊTRE - Entretien avec mes tripes - Ou l’art de tirer mon épingle du JE » ce poème suit la piste de l’introspection, de la connaissance de soi, de l’écriture salvatrice. Parce que le passé n’est jamais mort, nous sommes responsables d’un devoir de mémoire. Qui veut se construire doit d’abord s’appuyer sur les fondations du passé. On n’oublie pas (souhaitons-le pour longtemps) les horreurs de la guerre. Vivre c’est creuser « une tranchée patriote », refuser les obscurantismes « à coups de pioches et d’introspections ». S’affirmer comme être pensant, c’est connaître l’innommable. Le travail sur soi qu’est l’écriture permet de «renaître de son obscurité… » La traversée des enfers doit aboutir à la lumière. Les combats menés se font dans la guerre, la faim, la souffrance, la pauvreté. Il n’y a pas d’armistice dans la maladie. Elle traverse les siècles. Faisons comme Majead At'Mahel, un pas vers la compréhension et la connaissance. L’ « incipit » de l’être, ténèbres ou lumière ? L’écriture qui nous importe n’explore-t-elle pas ce mystère ?

    Lecture de Daniel Brochard

  • "Hawking ; Étoile sans origine", Catherine Andrieu

    image.jpgAvec cette poésie cosmologique*, Catherine Andrieu nous offre une nouvelle exploration. A la manière de l’astrophysicien Stephen Hawking, décédé en mars 2018, l’auteure nous convie à un voyage aux confins des étoiles. Ici l’âme s’émerveille de l’Univers. Les distances infinies effectuées en quelques lignes… Ici l’ambivalence de l’esprit et de la matière, vide et atomes se répondent. Le monde se confond avec la voix : « Je porte mes larmes comme un collier d’aurore ». L’observation est toujours concomitante de l’expression intérieure. C’est la loi de la physique Quantique. L’expérience influence l’observateur et vice versa. L’homme se confronte à un impossible : « Je me cogne comme un oiseau fou aux barreaux de l’être, aux barreaux du monde… » Les interrogations humaines sont sans fin, la science n’éclaire qu’une partie du monde ! Hawking, le savant, se poste devant son miroir, devant des millions d’années-lumière, l’œil au télescope. Comprendre l’univers, c’est se comprendre soi : « Où es-tu, toi mon je ? » Car le cosmos est en nous : « Tu absorbes une partie de la lumière dans ton champ gravitationnel », « Je saigne mes dernières gouttes d’aube… » La Science parle aussi bien de nous-mêmes que des étoiles. Au-delà de la vulgarisation, l’auteure revendique son droit à la rêverie. Car l’Univers ne nous appartient-il pas ? Ne sommes-nous pas tous capables d’être émerveillés ? Les considérations sur l’Univers s’expriment par un dialogue entre les âmes. Les « trous noirs », sortes de gouffres invisibles au cœur des galaxies, sont aussi très présents dans ce long poème… Ne sommes-nous pas un fétu de paille dans ce monde, destinés à disparaître ! Le temps humain, si fragile, si bref n’est rien en comparaison de la force des étoiles ! Ici, la poésie est mise à l’épreuve. Les questions les plus fondamentales sont posées. La poésie s’appropriant le réel, le merveilleux ! Le « rayonnement d’Hawking » devient plus qu’une découverte cosmologique, c’est une source de poème ! Tout comme les océans sont le début de l’évolution, la Science actuelle est le début d’une longue aventure humaine. A travers ce voyage, Catherine Andrieu écrit une ode au merveilleux, mais aussi un chant où l’âme exprime sa souffrance. Le vide du cosmos est propice à toutes les interrogations. « Je suis femme, je suis folle… » Dans cette rêverie, le désespoir n’est jamais très loin. La poésie permet d’éclairer le monde terne et l’âme humaine. Comme cet Univers qui ne cessera de nous questionner… « Tu peux tout imaginer, et faire tous les voyages, Hawking, ghost in the shell… »

    Daniel Brochard

     

    * Texte poétique paru en octobre 2018 aux éditions Rafael de Surtis

     

    Extrait :

    Un homme qui n’a pas de visage.

    Je suis l’homme sans visage, qui je suis ?  J’erre depuis des années…

    Qui je suis ?

    Mais toi tu savais si bien l’obscurité et ses fantômes…

    Il n’est pas un milieu, même dans le vide, où la lumière circulerait, éblouissement de l’éthéré qui rend la vitesse relative et le temps absolu…

    Car l’existence du temps absolu enveloppe le paradoxe…

    Nulle vitesse ne dépassera jamais celle de la lumière, et c’est Einstein, et c’est ton cul, bientôt, dans le fauteuil autistique du Maître… Ombres… Théâtre d’ombres… Je suis le cliquetis d’épées entre votre néant et la lumière…

    Tu comprends alors qu’en dehors du corps tout n’est qu’évanescence, l’on est du côté du rêve…

    La lumière des astres lointains ne nous touche que si longtemps après…

    L’actualité des événements glisse et échappe.

    Non, nous ne savons rien du présent de l’Univers, rivés que nous sommes au passé...

    Chevaucher le rêve, enjamber le temps…

    Voler plus loin pour respirer plus haut.

    Tu rêvais d’un ailleurs criblé d’aurores..

    De t’y tenir debout, poignardé de lumière…

    Ton oeil s’ouvre dans le noir.

    Oui, il bouge à la mesure de ton esprit prisonnier du scaphandre…

    Peu à peu j’approche mon visage du tien, je sens ton souffle fragile…

     

    (Catherine Andrieu : "Hawking ; Étoile sans origine")