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Réflexions - Page 5

  • Décroissance

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    L'ignorance est un des pires fléaux. A chaque instant, je me demande ce que je ne sais pas. Avoir bonne conscience, c'est déjà se condamner aux yeux du Bien. Que faire sinon être révolté ? « On est tous responsables de notre planète » clame Yann Arthus-Bertrand dans Madame Figaro 1131 (28 avril 2006). Je me souviens de soirées télévisées, de quelques débats et d'émissions criant l'urgence de prendre des mesures pour protéger notre planète. Aujourd'hui, les chiffres sont avancés et les conséquences tomberont quoi qu'il arrive. Pour certaines choses, on peut toujours corriger le tir, innover, inventer. Pour d'autres, comment allons-nous faire ? Les arbres qui brûlent, les espèces qui disparaissent - je pense aux trésors de l'Amazonie - seront à jamais perdus. J'ai beau tourner la question dans tous les sens à chaque instant, je ne trouve pas la paix. Peut-être que je ressens physiquement la déforestation, que l'esprit des tribus là-bas se transmet en moi. Il y a des prières qui doivent arriver jusqu'à moi. Faut-il attendre impuissant la fin du massacre et la naissance d'un nouveau désert ? Quel est le seuil tolérable de la perte de notre écosystème ? Pourra-t-on se relever sans entrer dans un nouveau Moyen-Age ? En attendant, je souffre dans ma chair la perte des richesses terrestres, fruits de millions d'années d'évolution. Je suis coupable. Je ne suis pas ignorant, donc je suis coupable. Et ça, ça me tient chaque minute de ma piteuse existence. Les forêts ne repousseront pas, quoi qu'on puisse en dire. Faut-il attendre de se prendre le mur pour pousser un cri ? Attendons-nous à des catastrophes. L'esprit de la terre souffre. Nos murs physiques et spirituels sont menacés. Je partirai avec ce cri en moi. Puisque je ne suis pas ignorant, je tape sur tout ce qui me paraît excessif, hypocrite et dangereux. « 112 600 km² de forêt régressent chaque minute : c'est l'équivalent de 33 terrains de foot », indique Madame Figaro. 8 pages intéressantes avec interviews de personnalités (Nicolas Hulot, Jean-Louis Etienne, Catherine Chabaud, Dominique Voynet, Jean-Marie Pelt...) sur 152 pages dont 60 pages de publicités exclusives, parmi une majorité d'articles navrants et de produits en tout genre (mais quoi... c'est Figaro Madame)... ça fait peu ! Je suis mort révolté contre l'ignorance, j'ai décidément beaucoup de mal à supporter la connerie, même involontaire. Je comprends maintenant pourquoi la poésie n'intéresse que quelques-uns, il y a trop de concurrence en face ! Tu veux parler ? Crier ? Achète un autre magazine. Il y en a plein, en cherchant tu finiras bien par trouver. Alors, pourquoi je tape sur Madame Figaro ? Et pourquoi pas ? Parce que la révolte me prend chaque matin et que j'ai beaucoup de mal à ne pas trouver un truc qui ne m'horripile. Donc, un autre jour je taperai sur les jeans Lewis, sur les magasins de vaisselle, sur les magasins de meubles, sur les supermarchés, sur les bijouteries, sur les hôtels trois étoiles... C'est vrai que je n'ai pas le profil vendeur. Il vaut mieux me donner de quoi me taire plutôt que de me voir entrer dans des débats d'idées qui amèneraient le système économique entier à la catastrophe. Donc, je prends chaque jour ma dose de médicaments, d'allocations familiales et de télévision pour éviter de propager ma rage qui, si elle pouvait sortir de ma cage dorée serait très néfaste à la consommation. Vous allez me dire : où est le rapport entre la forêt en Amazonie, Madame Figaro et le désir de décroissance ? Peut-être dans le fait que décidément ça va très mal. Alors, pour la forêt, je fais quoi ? Pour le Figaro c'est facile, je ne l'achète pas. Pour la décroissance, il y a France Inter. Mais pour la forêt, je fais quoi ?  Une balle dans la tête ? Au moins, je n'entendrai plus parler de ce bazar.

  • Toutes directions

    Plusieurs chemins se présentent devant moi alors que les ténèbres sont proches. L'écriture poétique est du passé. Je n'ai pas nécessité de revenir sur mes pas. Je m'attache à une écriture païenne. Je rejoins celle de la conversation en écrivant quelques articles. Si je retourne mon esprit dans tous les sens, ce n'est pas grave. C'est affaire d'homme, de conscience. Nous sommes portés à nous regarder, à nous extraire de nous mêmes, nous cherchons à comprendre quelque chose. Et puis, on prend le chemin du retour. On retourne à la maison, au village, allégés d'un sac à dos trop lourd à porter. On redécouvre les siens, les choses simples, les bonheurs fugitifs. Si écrire est peu à peu être de plus en plus conscient de soi, alors un moment vient où nous englobons dans notre pensée les choses les plus mystérieuses et cette réalité qui est notre vaste monde. Bien sûr, il faut laisser des traces, ne pas s'oublier à soi-même. Mais la vie quand même ! C'est ça notre matière première, ce sont nos sujets de discussions. Comment ne pas s'engager, rester en arrière ? Puisque le monde est notre sujet, notre modèle. Trop de choses se passent. Trop de mauvaises pensées. Je ne peux pas partir sans pousser un cri. Après s'être regarder soi, face au miroir, après avoir sondé les abîmes de soi, il faut explorer ceux du monde. Je reste, du haut de ma tour, attentif à ce qui m'entoure. Se taire ? Se diluer ? Il y a trop de chemins, trop de directions, trop de pancartes le long de la route. Les prendre tous ou n'en prendre aucun.

  • Le temps des cerises

    La poésie agissant comme un laboratoire, un stimulateur cardiaque, un placebo, un peu de bon sens ne fait pas de mal. La poésie n'en est pas le réceptacle exclusif, la philosophie non plus, ce qui importe c'est le sens évoqué pour chacun. Je me tape sans cesse contre des murs, devant cet absurde qu'est l'existence sur terre. Rien ne peut conduire à une explication totale et acceptable des mystères ici-bas. Descartes m'a toujours fait rire avec sa "preuve de l'existence de dieu"... Il en sait quoi, lui ? La philosophie n'apporte en tout et pour tout que des hypothèses, des suggestions toutes aussi vraies et bancales les unes que les autres. Certes, tout est bon à prendre, la curiosité intellectuelle ne peut pas avoir de limites. Il est normal de se poser des questions et d'essayer d'obtenir des réponses. Quand même, laissez-moi rire d'un rire lui aussi absurde, retentissant et grave ! Tout cela aide à vivre. Tout cela enrichit les esprits brumeux de nos adolescents. Cela donne des illusions de vérité avec usage de belles paroles, brevetées par diplômes et récompenses de toutes sortes. Tout est bon. Tout est affaire d'esprit, d'interprétations. Il est toujours bon d'avoir une canne pour marcher, d'avoir une épaule sur laquelle s'appuyer. Mais quand je pense à ce qu'on enseigne à nos étudiants en philosophie ! Sur quelle épaule je m'appuie, moi ? La vie ! Et le reste ! Dieu... Rien ne vaut le bon sens de nos ancêtres, celui du printemps, la sensation de vivre ! La recherche de réponses se nourrit de l'impossibilité d'en obtenir ! Notre esprit est libre de grandir et de se renouveler sans cesse autour de préoccupations qui le concernent. Mais sinon... quoi... il faut penser quoi ? C'est quoi la réponse au questionnaire ? Comment on fait pour avoir la meilleure note ? J'invite tous les étudiants à revenir boire et rire à l'auberge de la poésie. Je n'ai pas de réponses à vos questions. Je n'ai pas de réponses aux miennes. Nous pouvons tous aller pêcher tranquille. C'est pas aujourd'hui qu'on va se prendre la vérité sur le coin de la figure !